Les ZRR attirent les résidences de tourisme

Les ZRR attirent les résidences de tourisme 20 juillet 2005

Institué en 1995 pour favoriser l'implantation d'entreprises ou d'activités dans des zones dites de revitalisation rurale (ZRR), considérées comme fragiles sur le plan socio-économique (elles couvrent 39 % de la surface du territoire métropolitain où n'habite qu'un peu moins de 8 % de la population), le dispositif Demessine, appelé ainsi du nom de la secrétaire d'Etat au Tourisme du gouvernement Jospin, offre d'importants avantages fiscaux aux acquéreurs de logements destinés à la location et situés dans des résidences de tourisme construites. Il affiche un bilan très positif. « En 1999 et 2000, pendant les deux premières années de sa mise en oeuvre, son impact sur l'ouverture de résidences de tourisme a été faible mais, en 2002, il est devenu important puisque près de la moitié de celles mises en service cette année-là en ont bénéficié. Si, aujourd'hui, ce taux est redescendu autour d'un gros tiers, il devrait à nouveau augmenter grâce à l'extension des zones géographiques prévue par la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux », reconnaît Pascale Jallet, déléguée générale du Syndicat national des résidences de tourisme. Initialement destiné à s'éteindre à la fin de 2002, le dispositif a été régulièrement reconduit et même amélioré d'année en année. Désormais, il doit demeurer en vigueur jusqu'au 31 décembre 2010. Le groupe Wagram dont la vocation depuis sa création en 2000 est de mettre à la disposition des professionnels du patrimoine des biens immobiliers neufs ouvrant droit à défiscalisation a bien compris l'intérêt de ces ZRR. Surtout spécialisé dans les produits éligibles aux avantages de la loi Robien, il s'est lancé récemment dans ceux susceptibles de bénéficier de la loi Demessine. « Ils représenteront en 2005 près de 30 % de ceux que je préconise contre 5 % l'an dernier », indique Jerôme Menardo, son PDG qui travaille avec 26 promoteurs pour établir ainsi son système de références. « Ils sont le plus souvent locaux, à l'exception de Quiétude avec lequel nous développons un programme de 62 appartements à Lourdes ». Le principal critère à prendre en compte en dehors de la qualité de la construction et du gestionnaire de la résidence est, à ses yeux, « la potentialité du marché locatif. »

Des stratégies différentes Si la plupart des exploitants et des promoteurs de résidences de tourisme ont souhaité bénéficier de l'aubaine, leurs stratégies ont été quelque peu différentes. « Il ne s'agit pas, pour nous, de chercher spécialement des sites localisés en ZRR. Quand nous voulons nous développer, nous menons d'abord des études dans les lieux où cela nous apparaît judicieux. Tant mieux s'ils sont inclus dans une ZRR. Ainsi, en été 2006, nous ouvrons une résidence d'une centaine d'appartements à Soulac-sur-Mer, en Gironde, tandis que nous venons d'en livrer une autre Saint-Jean- Pied-de-Port, dans les Pyrénées-Atlantiques, et que, de toute façon, nous avions prévu de construire celle qui a été livrée il y a deux ans à Serre-Chevalier, la station de ski des Hautes-Alpes », explique Isabelle de Wavrechin, directeur général de Pierre & Vacances Conseil Immobilier, la structure du numéro un européen chargée de la commercialisation de ces résidences. Après s'être développé en montagne puis à la mer, le groupe s'intéresse à la campagne. Il s'est par exemple implanté à Argentat, en Corrèze, et à Monflanquin, dans le Lot-et-Garonne, deux communes bénéficiant du régime ZRR. « Notre clientèle, en particulier étrangère pour près de la moitié, notamment celle en provenance d'Europe du Nord, recherche des sites campagnards en France », justifie la responsable. Pas seulement dans le neuf, puisque les résidences rénovées peuvent également être éligibles au dispositif Demessine comme celle de Loches, en bordure de l'Indre, livrée en 2004. Résultat, près de 20 % des résidences construites ou rénovées par Pierre & Vacances sont localisées dans des zones de revitalisation rurale. Le taux des implantations nouvelles en ZRR d'Odalys, le numéro deux français des exploitants de résidences de tourisme, est beaucoup plus important. « En 2003-2004, il a été de l'ordre de 50 % », annonce Sylvain Briot, directeur du développement de cette société qui gère au total 50.000 lits répartis sur 140 destinations. « Nous avons commencé dans la vallée de la Maurienne, à Saint-Sorlin-d'Arves, où nous avons déjà fait construire trois résidences d'une capacité totale de 1.000 lits, car ce site présentait une très bonne adéquation entre la philosophie du texte et notre vision de la montagne, c'est-à-dire l'authenticité d'un village dans un massif sans grande notoriété et une station en devenir collant bien aux souhaits de la clientèle. » L'entreprise se flatte d'avoir repensé l'architecture des logements en privilégiant le bois au détriment du béton, mais également d'avoir fait évoluer le produit en lui intégrant non plus une piscine à ciel ouvert utilisable seulement en été mais couverte. Cet équipement devrait figurer dans son projet, à la Toussuire, toujours dans le domaine skiable des Sybelles, en Savoie, qui, depuis la mise en oeuvre des ZRR, a accédé à la quatrième ou cinquième place dans les Alpes. Odalys est également présent sur ce massif avec trois opérations réalisées à Saint-François-Longchamp sur le domaine de Valmorel ou à Pra-Loup, dans les Alpes-de-Haute-Provence. « Ce sont des stations en perte de vitesse qui n'ont pas su prendre en charge l'après-ski », affirme le responsable, qui étudie, dans les Alpes du Sud, un gros projet à Orcières-Merlette et un autre à Vars », et ouvre cette année à Pelvoux une petite résidence de cinquante logements équipée de jacuzzis qui, comme les deux installées près de Serre-Ponçon, a vocation à fonctionner en été. « N'ouvrir qu'en hiver ne serait pas intéressant. Pour espérer une rentabilité comprise entre 3 et 5 %, l'été doit représenter 20 à 25 % du chiffre d'affaires global », explique Sylvain Briot. Les Pyrénées ne sont pas oubliées avec une résidence à Peyragudes, près du col de Peyresourde, « qui marche très bien l'été », deux programmes à Saint-Lary (logements) et à Font-Romeu (100 appartements), tous deux avec piscines, dont les ouvertures sont prévues en décembre 2006. Les ZRR de bord de mer sont moins nombreuses. C'est pourquoi Odalys se contente d'une quarantaine de petites maisons à Solenzara, en Corse, et de 130 logements au Verdon-sur-mer, à proximité de l'embouchure de la Gironde, « où le remplissage est difficile car la clientèle étrangère est peu présente ». A la campagne, la société parie sur le Périgord avec l'ouverture à Montignac en juin 2006 d'une résidence de 100 logements construite en partenariat avec le promoteur Marignan avec qui elle s'est également associée en bord de rivière à Rignac, dans l'Aveyron. De même, elle ouvre ce mois-çi une résidence à Pressac, en Dordogne, en association avec Actif +. « A terme, tous ces programmes devront prévoir des animations, en particulier pour les enfants, est persuadé le responsable. S'il veut se démarquer des formules de logements en gîtes, le tourisme vert devra inventer des activités. »

Bons et mauvais sites D'autres exploitants, de taille plus modeste, se sont aussi fortement mobilisés, comme la firme d'origine britannique Eurogroup dont 30 % des 30 résidences (12.000 lits) sont localisés sur des ZRR. Situées à Valloire, Valmeinier, Saint-Jean-d'Arves, Saint-Sorlin-d'Arves, Orcières 1850 et Peyragudes, elles ont été construites en partenariat avec des promoteurs, comme Duguesclin-Elige, Languedoc Aménagement, Maulin Montagne Participation et Capri. Le plus attaché au dispositif demeure LVR, dont le gérant, Michel Ramos, a fondé cette société il y a cinq ans « avec l'objectif, grâce aux ZRR, de faire construire des résidences sur des sites intéressants ». Aujourd'hui, les trois quarts des 12 résidences - 5.000 lits au total - dont il est le gestionnaire se situent à Pra-Loup, Orcières-Merlette et Vars. Souhaitant travailler « très en amont sur la conception avec les promoteurs », il répond peu souvent favorablement - 2 fois sur 25 en un an - aux sollicitations de ceux qui viennent lui proposer « des produits déjà figés ». Il a collaboré avec Elige, le lyonnais Generim et le montpelliérain Primus. Il commence cependant à s'inquiéter de la profusion de constructions. « La clientèle n'est pas extensible et je crains qu'il y ait bientôt des dégâts », n'hésite-il pas à affirmer. Tous les sites ne constituent pas de bonnes opportunités. « Nous refusons de commercialiser dans des sous-stations telles que Valmeinier, sous prétexte d'avantages fiscaux », explique ainsi Jacques Tessier, responsable immobilier de la Sopep, la société de commercialisation du groupe GPD, une des plus anciennes SCPI françaises. Il se contente aujourd'hui de vendre un programme de 25 appartements remis à neuf à Mongenèvre, au-dessus de Briançon, sur un domaine skiable, la Voie lactée, partie intégrante du site des futurs jeux Olympiques d'hiver de Turin. Pierre-Olivier Toumieux, PDG du groupe Lagrange, se montre également réservé. Présent dans les ZRR de Savoie (à la Toussuire avec Eiffage et au Corbier), des Pyrénées (à Saint-Lary, « où les 400 lits sont surbookés en été », et à Font-Romeu, « où l'offre est insuffisante »), du Lot et du Périgord (près de Rocamadour et à Montignac « où la moitié des logements sont vendus à la clientèle étrangère »), il n'a fait construire dans ces zones, depuis trois ans, que deux résidences « sur un total de 10 à 15 par an ». Il s'inquiète notamment de la vogue des constructions en Maurienne. « L'offre des 3 étoiles standard y est très supérieure à la demande », constate-t-il. Le promoteur MGM Constructeur est sur la même longueur d'onde. Un seul de ses projets de résidence, le Hameau du rocher blanc - 180 appartements livrables à Noël 2006 à Serre-Chevalier -, est en ZRR. « Nous n'avons fait que répondre à une demande de la commune parce qu'il s'agissait d'un bon emplacement, explique Gabriel Mingeon, directeur commercial. Que le site ait été en ZRR n'a été que la cerise sur le gâteau. » Le groupe étant axé sur le haut de gamme, il lui est difficile de les proposer à moins de 100.000 euros, la limite au-delà de laquelle le dispositif fiscal ne s'applique plus. Elige, du groupe Vinci, se dit au contraireséduit par les zones. « Les résidences que nous y construisons représentent en moyenne 30 % de l'ensemble de nos réalisations », calcule Gilbert Peyne, directeur régional Rhône-Alpes et responsable national de la société pour cette activité. « Notre régle est de pouvoir nous associer avec un gestionnaire digne de ce nom sur des sites susceptibles d'être remplis en hiver comme en été afin d'offrir aux acquéreurs une rentabilité comprise entre 4 et 5 % s'ils choisissent d'occuper leur bien quatre semaines par an et entre 4,5 et 5,5 % dans le cas contraire. »